Déposé le 23/10/2018 à 12h53 Opinion citoyenne
Introduction
Nous sommes des médecins canadiens consternés et concernés par les impacts – sur les patients, sur les médecins, sur la pratique médicale – de l'implantation universelle de l'euthanasie dans notre pays, définie comme un « soin de santé » auquel tous les citoyens ont droit sous condition de remplir des critères ambigus et arbitraires.
Beaucoup d'entre nous sont tellement touchés par la difficulté de pratiquer la médecine sous ces nouvelles contraintes que nous pourrions être forcés, pour des raisons d'intégrité et de conscience professionnelle, d'émigrer ou de nous retirer complètement de notre pratique. Nous sommes tous profondément inquiets du futur de la médecine au Canada. Nous croyons que ce changement sera non seulement nuisible à la sécurité des patients, mais également à la perception par le public – et par les médecins eux-mêmes – que nous sommes réellement une profession dédiée seulement à la guérison et au mieux-être. Nous sommes donc très inquiets (...)
Les patients et les soins palliatifs
En tant que médecins de tradition hippocratique, nous nous concentrons sur le bien de nos patients, en évitant l'acharnement thérapeutique et en répondant à leur souffrance avec compassion, compétence et avec l'aide des soins palliatifs. Nous sommes inquiets de constater que le nombre de médecins québécois qui commencent à travailler en soins palliatifs a diminué après la légalisation de l'euthanasie, pendant que le Collège des Médecins du Québec (CMQ) et l'Association des soins palliatifs du Québec craignent maintenant que les patients choisissent l'euthanasie du fait que des soins palliatifs adéquats ne seraient pas disponibles.
Nous sommes perturbés et affligés par l'histoire d'une femme handicapée de 25 ans en crise aiguë dans une salle d'urgence, contrainte d'envisager le suicide assisté par un médecin traitant, qui a traité sa mère d'« égoïste » parce que celle-ci voulait protéger sa fille.
Nous sommes troublés et furieux d'apprendre que les autorités hospitalières ont refusé à un patient atteint d'une maladie chronique et gravement handicapé les soins dont il avait besoin, suggérant plutôt l'euthanasie ou le suicide assisté .
Et nous avons été étonnés d'apprendre que, pendant un temps, certains urgentistes du Québec ont laissé mourir des personnes ayant fait des tentatives de suicide, alors qu'ils auraient pu leur sauver la vie. Ces incidents ont fait leur apparition au moment de l'entrée en vigueur de la loi québécoise sur l'euthanasie, et le président de l'Association des médecins d'urgence du Québec a émis l'hypothèse que la loi et la publicité qui l'accompagnaient pouvaient avoir rendu « confus » les médecins quant à leur rôle.
(...)
Conclusion (...)
Nos observations et expériences personnelles au cours des deux dernières années confirment notre conviction que la pratique de la médecine hippocratique est fondamentalement incompatible avec l'euthanasie et le suicide assisté. Rendre obligatoire la prestation de ces « services » à l'échelle du système et la participation des médecins dans les cabinets médicaux pourrait transformer la culture médicale, ce qui rendra finalement impossible la pratique médicale hippocratique.
(...) Nous croyons que les médecins et les associations médicales devraient défendre vigoureusement l'excellent modèle reçu de notre Histoire. Et l'euthanasie, ce n'est pas de la médecine.
Article publié dans le World Medical Journal
Article publié dans le World Medical Journal